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Technique de manipulation mentale : la fausse accusation de violence (2).

Plongez dans les mécanismes sous-jacents de la manipulation mentale à travers l’analyse de la fausse accusation de violence. Cet article dévoile comment des provocations délibérées peuvent entraîner des réactions agressives, permettant ensuite d’accuser injustement l’autre de violence. Apprenez à reconnaître et déjouer ces techniques pour protéger votre intégrité face à de telles manipulations. Une lecture essentielle pour quiconque souhaite comprendre les dynamiques de pouvoir et de contrôle dans les interactions humaines.

Dans un premier temps, je voulais rédiger le deuxième article sur la technique dite de la porte au nez, qui est l’exact contraire du pied dans la porte. Dans le pied dans la porte, il s’agissait d’avancer discrètement pour amadouer le chaland, d’avancer pas à pas pour l’emmener vers un acte qu’il aurait refusé d’emblée. Dans la porte au nez, il faut frapper un grand coup dès le début pour ensuite faire une proposition raisonnable qui sera acceptée à coup sûr. L’article n’est pas encore fini. Il nécessite une importante recherche documentaire dans les publications scientifique de psychologie sociale. Bref, il n’est pas encore fini. Soyez patient.

En revanche, il s’avère que deux articles étaient quasiment fini, l’un sur la violence et l’autre sur la folie. Je voulais les publier à la fin d’une première série d’article sur le pied dans la porte, la porte au nez, la dissonance cognitive et l’amorçage. Technique classique de manipulation mentale en psychologie sociale.

Le destin me confronta a une expérience qui m’opposa à Pierre-Yves Rougeyron et a ses adeptes… Oui, oui adeptes… Car avec ce genre d’individu, nous ne sommes pas loin de la secte et du gourou. Je fut accusé d’être violet et fou. Deux accusations que l’on me jeta souvent à la figure durant ma vie. Le deuxième article portera donc sur la fausse accusation de violence comme technique de manipulation pour faire taire un adversaire. Le troisième concernera la psychiatrisation de l’ennemi afin de le décrédibiliser. Deux sujets qui me tiennent particulièrement à cœur.

En matière de manipulation mentale, il faut ici démontrer point par point les mécanismes. Bien expliquer les choses permet de désarmer l’ennemi et de rendre inefficace son attaque. La manipulation psychologique ne fonctionne que lorsqu’elle est inconsciente. Il faut le dire et le répéter sans cesse. Dès lors, que public à compris le mécanisme en jeu, la technique se retourne contre son adversaire. C’est pour cette raison que j’ai entrepris ce travail salutaire d’information du public. La bataille des idées est une guerre décisive, bien plus importante que la guerre avec des armes létale. L’oligarchie qui contrôle le pouvoir ne tient sa suprématie que sur la propagande. Elle a compris l’importance de l’enjeu de la diffusion des idées. C’est le soft power, enjeu fondamental de notre époque.

Comme je l’ai déjà écrit, j’ai deux livres de chevet qui me servent de guide depuis de nombreuses années pour décodée le monde actuel : “l’art d’avoir toujours raison” de Arthur Schopenhauer et “le château” de Franz Kafka. Je vais m’appuyer sur eux pour vous expliquer les choses.

Une chose à bien comprendre dès le début. Une personne intelligente, cultivé répondra à son interlocuteur par des arguments structurés. La manipulation mentale est un outil utilisable par celui qui n’a pas la capacité d’argumenter. Elle est là pour masquer une certaine déficience au niveau de l’intelligence. C’est souvent un indice à prendre en compte pour juger de la compétence d’un interlocuteur.

Je voulais aussi dire, avant de commencer, que mon précédent article sur le pied-dans-la-porte a été beaucoup lu et cité par un certain nombre de journalistes venant des médias meanstream ou de la dissidence, parfois quasiment mot pour mot. Cela me touche beaucoup. Mes idées pénètrent les esprits. Je regrette seulement que mon nom d’artiste ou celui de mon site ne sont jamais cité. Il y a comme un mur du silence autour de moi afin de faire en sorte que je n’existe pas. On prend mes idées, mais sans évoquer celui qui en parle.

Je suis un nobody comme me là dit ce fameux “follower” de Pierre-Yves Rougeyron.

Je le revendique. Oui, je suis un nobody. Qu’en est-il de Rougeyron ? Est-il nobody lui aussi ? Pourquoi est-il relayé artificiellement (sans grand succès) par certaines personnes influentes?

Rougeyron est issu de la grande bourgeoisie que j’ose à peine qualifier de Française (fils de médecin) et surtout il est relayé par d’importants réseaux maçonnique.

Et pourtant, lui aussi, est totalement inconnu du grand public. Et pour cause, lorsqu’un individu, sans talent, est présenté au public, les gens ne s’y intéresse pas. Vous me trouvez dur avec lui. Il suffit d’écouter ses vidéos youtube d’une stupidité sans nom pour comprendre qu’il a moins de chose à dire que moi. Lisez son seul article dans Valeurs Actuels. Le vide intersidéral. Pourtant, c’est lui qui est mis en avant, car il ne dérange pas l’oligarchie. Un jour, les masques vont tomber, les trahisons des uns et des autres seront connus, car les temps dans lesquels nous sommes entrées vont faire chuter beaucoup de gens illégitime et faire monter d’autres valeurs. C’est le propre des grand boulversements.

J’ai en mémoire un passage du livre “Où allons-nous ?” de Georges Bernanos. Un recueil écrit en 1943 et diffusé dans une France occupé par la barbarie nazie. Il présentait alors la future libération du pays, l’émergence du sauveur (le général de Gaule) et des grands changements qui allaient venir à la libération. C’est à cela que l’on reconnaît les grands génies, de sentir les choses à l’avance, de deviner avant tout le monde les changements qui s’annoncent. Il manque à notre époque un génie visionnaire comme Bernanos.

La paix de demain, comme celle d’hier, ne connaîtra qu’une seule espèce d’hommes réellement inassimilables, le héros, vivant ou mort.

J’éprouve quelques pudeurs à écrire ce mot diffamé, mais je n’en éprouve pas d’autre. Du moins lui donnerai-je son sens le plus humble. J’appelle ici héros quiconque s’est montré capable d’héroïsme, qui a préféré une fois – je ne dis pas une fois pour toutes, je dis une fois seulement – l’honneur à la vie.” (Georges Bernanos, Où allons-nous ?, Editions du Seuil, p. 87).

Or, la nature même des gens ccmme Rougeyron est de se soumettre à genoux (comme les footballeurs) devant le pouvoir. Il n’y a rien d’héroïque chez eux.

Car nous revenons de loin nous autres Français, nous revenons vraiment du bout de la nuit ; n’attendez pas de nous ces messages éclatants qui tombent du ciel avec la triomphale bénédiction de l’aube. Celui que je vous apporte n’est qu’une sorte de pressentiment, une espérance à peine exprimable encore. Anglais, je crois que nous verrons de grandes choses ; mais elles viendront comme toujours, d’où personne ne les attend. Dès qu’on prononce le mot “salut”, nous levons tous le nez en l’air, ce qui – permettez-moi de vous le dire – est une singulière habitude pour des chrétiens. Les Juifs de Nazareth aussi levaient le nez en l’air, et le petit Jésus jouait sur la place de la synagogue ; ils le bousculaient sans le voir, en passant. Anglais, la misère et l’humiliation des hommes sont en train de germer sous la terre ; et, comme toute semence, il leur a fallu d’abord pourrir. Je m’excuse de parler ce langage poétique ; je veux dire que l’énormité de nos déceptions ne saurait être une raison de désespérer ; l’idée en devrait plutôt raffermir nos courages.” (Georges Bernanos, Où allons-nous ?, Editions du Seuil, p. 89).

Dans un autre chef-d’œuvre de Georges Bernanos, “les grands cimetières sous la lune“, il parlait des imbéciles pour qualifier les gens comme Rougeyron.

Je reprends à mon compte la pensée de Bernanos sur ce point. Le propre de notre époque décadente est que les crétins sont au pouvoir. Et c’est pour cela que tout va si mal. L’intelligence est repoussée dans la marginalité, elle est persécutée.

Concernant la fausse accusation de violence, nous devons distinguer deux méthodes, celle qui utilise une provocation à la violence (I) et celle qui consiste a inventer une violence imaginaire (II).

I. La provocation à la violence.

La technique dite de la provocation à la violence fut théorisé par Schopenhauer dans “l’art d’avoir toujours raison“.

Ce livre est une mine d’or pour comprendre les techniques de propagande. Il donne un certain nombre de stratagèmes à utiliser dans un débat afin de vaincre son adversaire. Ils y en a trente-huit. Trois stratagèmes concerne l’instrumentalisation de la violence, le huitième, le vingt-septième et l’ultime stratagème.

Le huitième s’intitule “fâcher l’adversaire“.

Stratagème VIII
Fâcher l’adversaire

Provoquez la colère de votre adversaire : la colère voile le jugement et il perdra de vue où sont ses intérêts. Il est possible de provoquer la colère de l’adversaire en étant injuste envers lui à plusieurs reprises, ou par des chicanes, et en étant généralement insolent.

Le vingt-septième déclare que “la colère est une faiblesse”.

Stratagème XXVII
La colère est une faiblesse.

Si l’adversaire se met particulièrement en colère lorsqu’on utilise un certain argument, il faut l’utiliser avec d’autant plus de zèle : non seulement parce qu’il est bon de le mettre en colère, mais parce qu’on peut présumer avoir mis le doigt sur le point faible de son argumentation et qu’il est d’autant plus exposé que maintenant qu’il s’est trahi.

Enfin l’ultime stratagème nous dit “soyez personnel, insultant, malpoli“.

Ultime stratagème
Soyez personnel, insultant, malpoli
Lorsque l’on se rend compte que l’adversaire nous est supérieur et nous ôte toute raison, il faut alors devenir personnel, insultant, malpoli. Cela consiste à passer du sujet de la dispute (que l’on a perdue), au débateur lui-même en attaquant sa personne : on pourrait appeler ça unargumentum ad personam pour le distinguer de l’argumentum ad hominem, ce dernier passant de la discussion objective du sujet à l’attaque de l’adversaire en le confrontant à ses
admissions ou à ses paroles par rapport à ce sujet. En devenant personnel, on abandonne le sujet lui-même pour attaquer la personne elle-même : on devient insultant, malveillant, injurieux, vulgaire. C’est un appel des forces de l’intelligence dirigée à celles du corps, ou à l’animalisme. C’est une stratégie très appréciée car tout le monde peut l’appliquer, et elle est donc particulièrement utilisée. On peut maintenant se demander quelle est la contre-attaque,
car si on a recours à la même stratégie, on risque une bataille, un duel, voire un procès pour diffamation.

Ce serait une erreur que de croire qu’il suffit de ne pas devenir personnel soi-même. Car montrer calmement à quelqu’un qu’il a tort et que ce qu’il dit et pense est incorrect, processus qui se retrouve dans chaque victoire dialectique, nous l’aigrissons encore plus que si nous avions utilisé une expression malpolie ou insultante. Pourquoi donc ? Parce que comme le dit Hobbes dans son de Clive, chap. 1 : Omnis animi voluptas, omnisque alacritas in eo sita est, quod quis habeat, quibuscum conferens se, possit magnifice sentire de seipso. Pour l’homme, rien n’est plus grand que de satisfaire sa vanité, et aucune blessure n’est plus douloureuse que celle qui y est infligée. (De là viennent des expressions comme « l’honneur est plus cher que la vie », etc.) La satisfaction de cette vanité se développe principalement en se comparant aux autres sous tous aspects, mais essentiellement en comparant la puissance des intellects. La manière la plus effective et la plus puissante de se satisfaire se trouve dans les débats. D’où l’aigreur de celui qui est battu et son recours à l’arme ultime, ce dernier stratagème : on ne peut y échapper par la simple courtoisie. Garder son sang-froid peut cependant être salutaire : dès que l’adversaire passe aux attaques personnelles, on répond calmement qu’elles n’ont rien à voir avec l’objet du débat, on y ramène immédiatement la conversation, et on continue de lui montrer à quel point il a tort, sans tenir compte de ses insultes, comme le dit Thémistocle à
Eurybiade : παταξον μεν, άκονσον δε. Mais ce genre de comportement n’est pas donné à tout le monde.

Arthur Schopenhauer explique comment mettre en colère son interlocuteur, pour ensuite lui jeter à la figure qu’il est agressif. Certains sont passé maître dans ce domaine.

La technique se déroule donc en trois étapes : la provocation (A), la réaction agresive de l’interlocuteur pour ensuite lui reprocher cette violence (B).

A. La provocation.

Pour Schopenhauer, il existe plusieurs manières de provoquer une réaction agressive. Il faut être injuste, chicaner sur des points de détail, être insolant (VIII), utiliser des arguments qui le mettent en colère (XXVII), être personnel, insultant ou malpoli (argument ultime).

De manière théorique, la provocation à la violence entre dans le cadre de la comparaison sociale (1) développée par le psychologue sociale Léon Festinger. Elle doit se faire en mettant en œuvre plusieurs type d’argument (2).

1. La comparaison sociale.

Reprenons le texte de Schopenhauer pour aborder point par point sa méthode :

Lorsque l’on se rend compte que l’adversaire nous est supérieur et nous ôte toute raison, il faut alors devenir personnel, insultant, malpoli. Cela consiste à passer du sujet de la dispute (que l’on a perdue), au débateur lui-même en attaquant sa personne..

L’accusation de violence doit être utilisée lorsque l’adversaire nous est intellectuellement supérieur, sinon il n’y a aucun intérêt. C’est l’arme des faibles. Un interlocuteur a perdu sur le terrain des arguments, il va changer de sujet et s’attaquer brutalement à la personne qui débat contre lui.

Il faut bien comprendre le mécanisme psychologique en jeu. Il est d’une grande importance. Il met en application le mécanisme de la comparaison sociale. Il fut magistralement mis en évidence par Léon Festinger et amélioré ensuite par une expérience célèbre de Lemaine en 1966.

C’est l’expérience dite de la cabane où deux groupes de cinq enfants doivent s’affronter pour construire la plus belle cabane en bois dans un arbre. L’expérimentateur va volontairement favoriser un des deux groupes d’enfants et observer leurs réactions réciproque.

Un groupe va recevoir de la ficelle par tirage au sort et l’autre n’aura rien. Avec de la ficelle, c’est beaucoup mieux pour attacher les bouts de bois et les planches entre elles. Il y a un très net avantage donné a l’un vis-à-vis de l’autre. Un groupe contrôle sera organisé ou les deux auront de la ficelle.

Lemaine va mettre en évidence deux cas de figure qui vont générer deux types de réactions.

Dans un premier cas de figure, il observe que lorsque la distance entre les deux groupes d’enfants est faible (les deux ont de la ficelle), les enfants vont se surpasser pour atteindre l’objectif et tenter de dépasser l’autre. Une compétition s’instaure pour fabriquer la plus belle cabane.

Dans un deuxième cas de figure, lorsque la distance entre les groupes est très forte, celui qui est défavorisé se sens menacé dans son identité. Il va réagir de trois manières :

  • Il accepte sa défaite et se justifie sur celle-ci.
  • Il essaye d’apporter une série d’innovation en se positionnant sur une autre dimension dans laquelle il excelle.
  • Il essaye d’apporter une série d’innovation en se positionnant sur une autre dimension dans laquelle il excelle. Mais en plus de cela, il va tenter de faire reconnaitre socialement cette nouvelle dimension et de la substituer à l’ancienne.

Donc reprenons le cas du débat pour lui appliquer les principes de la comparaison sociale. Dans le cadre d’une confrontation politique, les deux adversaires sont de même niveau. Ils vont entrer dans une saine compétition pour faire valoir leurs idées sur celle de l’autre. Le débat ne portera que sur des arguments de fond (on dira ad rem). C’est le premier cas de figure de Lemaine.

En revanche, parfois, il y a une réelle différence de niveau entre les deux interlocuteurs. Cela se produit souvent. Si l’interlocuteur, pour des raisons d’ego, ne veut pas reconnaître sa défaite, il va alors changer de domaine ou en passant des arguments sur le fonds aux arguments contre la personne. Certains iront même jusqu’à tenter de substituer la personnalité du débatteur à ses arguments comme nous le verrons dans l’exemple que je donnerai plus tard.

2. Les arguments.

Nous avons deux arguments à faire valoir pour s’attaquer à la personne. Arthur Schopenhauer parle des arguments “ad hominem” (2-1) et “ad personam” (2-2).

a. Les arguments ad hominem.

Les arguments ad hominem vise à évoquer les propres paroles ou actes de son adversaire afin de jeter l’opprobre sur son action et ses idées.

Schopenhauer en parle dans le seizième stratagème :

Stratagème XVI
Argument ad hominem
L’argumenta ad hominem ou ex concessis : lorsque notre adversaire fait une proposition, il faut vérifier si celle-ci ne serait pas inconsistante – même si ce n’est qu’une apparence – avec d’autres propositions qu’il a faites ou admises, ou avec les principes de l’école ou de la secte à laquelle il appartient, ou avec les actions des membres de son culte, au pire avec ceux qui donnent l’impression d’avoir les mêmes opinions, même si c’est infondé.

Par exemple, s’il défend le suicide, on peut lui répondre : « Alors pourquoi ne te pends-tu pas ? » Ou encore, s’il soutient qu’il ne fait pas bon vivre à Berlin, on peut rétorquer : « Pourquoi ne prends-tu pas le premier express pour la quitter ? »

Tel est le genre de chicanes que l’on peut utiliser.”

Je n’en dirais pas plus, les propos son suffisamment claire.

b. Les arguments ad personam.

Les arguments “ad personam” vise à discréditer l’adversaire sur sa personne même.

Schopenhauer en dit quelques mots dans sa stratégie ultime.

Lorsque l’on se rend compte que l’adversaire nous est supérieur et nous ôte toute raison, il faut alors devenir personnel, insultant, malpoli. Cela consiste à passer du sujet de la dispute (que l’on a perdue), au débateur lui-même en attaquant sa personne. (…) En devenant personnel, on abandonne le sujet lui-même pour attaquer la personne elle-même : on devient insultant, malveillant, injurieux, vulgaire.

B. La réaction violente et le reproche de la violence.

L’utilisation des arguments ab hominem ou ab persona ont pour objectif de déstabiliser l’interlocuteur, de provoquer sa colère et ensuite l’accuser d’être violent. Il faut bien comprendre l’enchaînement du processus en trois actes.

Premier acte : on provoque l’interlocuteur en l’attaquant personnellement.

Deuxième acte : la personne attaquée réagit avec violence contre cette attaque quelle considère comme injuste.

Troisième acte : On accuse l’interlocuteur d’être agressif.

Il faut faire remarque, et cela est très important, que l’interlocuteur n’est pas violent de manière spontanée. Il a été provoqué et son agressivité est une réaction a cette attaque initiale. Or, l’adversaire va tout faire pour laisser croire que la personne est agressive de manière naturelle. Il est né comme cela. C’est un “forcené”, c’est-à-dire quelqu’un né avec de la violence en lui. Lorsqu’on analyse finement la chose, on se rencontre que c’est un mensonge, que l’on trompe le spectateur. C’est une méthode redoutable, car naturellement l’être humain a peur des gens agressifs. On fuit ses gens-là.

L’attention n’est plus portée sur le message, mais sur le messager. On ne s’intéresse plus a ce que dit l’interlocuteur, mais sur sa supposée personnalité. L’accusation de folie n’est d’ailleurs jamais loin, mais nous en parlerons dans l’article suivant.

Donnons un exemple tiré de la vie politique française. Un débat politique resté dans la légende. Ils permettent de mettre en évidence le mécanisme de manière plus concret. Cela concerne Jean-Marie Le Pen, qui fut accusé d’être agressif. Observons son débat contre Bernard Tapie en 1989.

Dès le début de l’échange, Bernard Tapie va jeter à la figure de Jean-Marie Le Pen sa violence verbale, et même physique dans une scène qui semble avoir été préparé à l’avance par l’ancien président de l’OM. Un modèle du genre qui devrait être étudié dans les écoles de communication.

Voici la retranscription des échanges verbaux réalisé par mes soins. J’ai eu la chance de pouvoir regarder le débat en direct à l’époque devant ma télévision comme simple téléspectateur. J’étais très jeune, j’avais à peine 17 ans. Un souvenir impérissable qui me marqua à vie. La preuve, j’en parle aujourd’hui avec une certaine émotion. Un de ses tournants majeurs qui marque une vie à jamais. Je pense que mes propos ne sont pas exagérés, loin de là. Bien sûr, je n’ai pas honte d’avouer que je n’avais pas bien compris ce qui se passa précisément dans leur échange. Juste un sentiment étrange que la télévision me mentait. Une petite graine qui fut plantée dans mon cerveau. C’était normal, j’étais si jeune. Il me faudra plusieurs années pour comprendre ce qui se passa ce jour-là, pour que la petite graine germe.

Rappelons-nous, il y a trois étapes.

Pour retrouver la première étape du processus, c’est-à-dire la provocation de l’interlocuteur, il faut rechercher dans le contexte d’avant débat. Nous étions dans le cadre de la campagne électorale des élections européennes de 1989. TF1 souhaitait organiser un grand débat entre les têtes de listes.

Or très vite, TF1 va feindre de s’apercevoir que personne ne veux débattre avec Jean-Marie Le Pen. Sans doute la peur et le manque de courage de ses adversaires. A mon avis, ce n’est pas la seule raison. On ne voulait pas rendre crédible la parole du président du Front National, en discutant sur un pied d’égalité avec lui. Pour justifier leurs refus, ils vont inventer une stratégie.

En effet, quelques jours, plus tôt, Monsieur Le Pen avait débattu avec Lionel Stoleru, ancien ministre de Giscard (de 1974 à 1981) puis de François Mitterrand. Le débat eut lieu le midi sur la Cinq avec Jean-Claude Bourret comme arbitre.

Soudain, alors que les échanges étaient cordiaux, Jean-Marie Le Pen demande à son interlocuteur si celui-ci avait une double nationalité franco-israélienne. Cette simple question va se transformer en une incroyable accusation d’antisémitisme. Condamnation unanime de la classe politico-médiatique. L’affaire servira de prétexte pour justifier le refuser de débattre.

Nous avons la première étape. C’est une attaque ad hominem. On reproche à Jean-Marie Le Pen d’être antisémite, car il demandait à un ministre de Mitterrand s’il avait la nationalité israélienne. Aujourd’hui, la polémique fait sourire. Il y a tellement de bi-nationaux, voir de tri-nationaux en politique et dans le gouvernement. D’ailleurs pas seulement franco-israélien, mais aussi franco-marocain, franco-algérien ou franco-sénégalaise.

Finalement ne restera que Bernard Tapie pour mener la contradiction face à Jean-Marie Le Pen.

Le président du FN va dès le début des échanges, dénoncer ce lynchage médiatique et accuser la bande des quatre, c’est-à-dire les quatre partis politique qui monopolisait le pouvoir depuis 1945 (PS, PCF, RPR et UDF) de monopoliser le pouvoir. Je me rappelle très bien de ce moment où il porta ses accusations sur la bande des quatre. Une expression d’une redoutable efficacité, qui fut ensuite déclinée en UMPS (bande réduite à deux partis) puis LRPS (prononcé l’herpés).

Bernard Tapie, homme d’une remarquable intelligence, avait remarqué que Monsieur Le Pen parlait fort. C’est une habitude que j’ai aussi. Je connais très bien son problème. C’est une mauvaise habitude que l’on retrouve chez ceux privé du droit à la parole publique. On a quelques minutes, une fois de temps en temps, pour s’exprimer, on se fait interrompre sans cesse (ce qui est aussi une forme de censure). Pour compenser cette infériorité que l’on considère comme injuste, on parle haut et fort pour couvrir la voix de celui qui vous interrompe. On parle vite et fort, pour dire le plus de chose possible, en quelques minutes.

Une personne souvent invitée et que l’on laisse s’exprimer sans interruption peut parler calmement sans avoir besoin de hausser le ton. On lui laisse finir ce qu’elle dit. Elle peut donc parler calmement. A la même époque, il faut observer le ton calme et posé d’un François Mitterand qui disposa durant toute sa carrière politique d’un temps de parole considérable.

Or, Bernard Tapie va utiliser ce défaut de locution en le jetant à la figure de Jean-Marie Le Pen. C’est là que l’on comprend, que le président de l’OM à préparer sa “punch line”. C’est incontestable à la lecture des images. Il suffit d’observer son comportement lorsque Jean-Marie Le Pen parle. La communication non-verbale est très importante. Elle en dit beaucoup plus sur ce que l’on pense, que les mots eux-mêmes.

Que voit-on ?

Bernard Tapie, à le sourire en coin pendant que Jean-Marie Le Pen parle. Il le laisse s’exprimer calmement sans l’interrompre, en attendant le moment favorable pour frapper. A plusieurs reprises, on peut voir Monsieur Tapie commencer une phrase pour interrompre Monsieur Le Pen. Mais il se ravise. Etonnant pour un homme qui lui aussi à le verbe haut (mais lui, il a le droit). Nous avons ici, la deuxième étape, c’est-à-dire un Jean-Marie Le Pen qui parle de manière agressive.

Voici la retranscription du fameux échange.

Bernard Tapie :Attendez, c’est pas parce que vous avez une grande gueule et que vous criez fort…”

Jean-Marie Le Pen : “Soyez polie s’il vous plaît…”

Bernard Tapie : “Mais je ne peux pas être polie avec vous”.

Jean-Marie Le Pen : “Vous êtes sorti des bas-fonds, on le sait, mais soyez poli. Vous avez dû apprendre à parler depuis que vous êtes sorti”.

Bernard Tapie : “la seule différence, c’est que c’est que ce n’est pas parce que vous affirmez fort quelque chose que ce que vous dites est vrai, parceque vous dites n’importe quoi.”

Bernard Tapie jette à la figure de Jean-Marie Le Pen, “c’est pas parce que vous avez une grande gueule et que vous criez fort”. C’est une accusation de violence, c’est-à-dire la troisième étape. Jean-Marie Le Pen va même en rajouter en accusant Tapie de sortir des bas-fonds et de ne pas savoir parlé correctement. Et Bernard Tapie d’en remettre une couche “la seule différence, c’est que c’est que ce n’est pas parce que vous affirmez fort quelque chose que ce que vous dites est vrai.”

Résumons :

Première étape : refus de débattre de ses interlocuteur en raison de son antisémitisme.

Deuxième étape : Jean-Marie Le Pen parle fort et accuse ses adversaires d’être des peureux.

Troisième étape : Bernard Tapie accuse Jean-Marie Le Pen de parlé fort, d’être agressif.

Ensuite les médias diffuseront l’image d’un Jean-Marie Le Pen éructant et accusant la bande des quatre. Il reprendrons le moment où il hurle “, c’est un hâbleur, un matamore, un tartarin”, et Bernard Tapie lui disant calmement “c’est pas parce que vous avez une grande gueule et que vous criez fort”. Il n’expliqueront jamais que c’est le refus du débat des autres adversaires politiques de Le Pen qui auront provoqué sa colère.

Les Guignols de l’info joueront sur ce registre durant plusieurs décennies, en montrant le président du FN, avec une marionnette au visage haineux, le coin de la bouche pour faire voir une dent. Il ressemble à un terrifiant bulldog. Lorsqu’il s’exprime, il hurle et crache de volumineux postillons blancs. Une terrible caricature.

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L’image inventée par les médias renvoi immanquablement au meeting d’Adolf hitler dans les années trente. Luis aussi parlait fort et accusait les gens. Une comparaison qui fait peur, même chez les gens les plus modérés. Il y a comme cela des images qui frappe l’inconscient collectif du peuple. Rien ne peut contrecarrer une telle stratégie.

https://www.youtube.com/watch?v=RPtK7cPj2BY

II. L’invocation d’une violence imaginaire.

Parfois, il n’est même pas nécessaire de provoquer une réaction agressive de son adversaire Il suffit simplement d’affirmer qu’il a été violent. Une affirmation imaginaire. Le plus bel exemple de ce que je dis se trouve dans le roman de Franz Kafka, “le château”.

K a été recruté comme arpenteur dans le village du comte WestWest. Il va rencontrer les plus grandes difficultés pour se faire reconnaître par les habitants et les fonctionnaires du village. Un entretien est prévu sur son avenir avec le maire.

L’idée que K. se faisait des autorités de l’endroit se trouva d’abord fortement confirmée par sa visite au maire. Ce maire, un gros homme aimable et entièrement rasé, était malade ; il avait un grave accès de goutte et reçut K. au lit.

– Voici donc Monsieur notre Arpenteur, dit-il, et il chercha à se redresser pour saluer ; mais il ne put y parvenir et se rejeta sur ses oreillers en montrant ses jambes comme excuse.

Une femme silencieuse, qui avait presque l’air d’une ombre dans le crépuscule de cette chambre aux fenêtres minuscules encore assombrie de rideaux, apporta une chaise à K. et la plaça auprès du lit.

– Asseyez-vous, asseyez-vous, Monsieur l’Arpenteur, fit le maire, et dites-moi vos désirs.

K. lui lut la lettre de Klamm et ajouta quelques réflexions. Il éprouvait une fois de plus la sensation de l’extraordinaire dans ses rapports avec l’autorité. L’autorité acceptait tous les fardeaux, on pouvait tout lui mettre sur le dos et on restait personnellement libre et serein. Le maire, comme s’il eût aussi senti cela à sa façon, se tourna péniblement dans le lit. Finalement il dit à K. :

– Comme vous avez pu le remarquer, Monsieur l’Arpenteur, j’ai bien eu connaissance de toute cette affaire. Si je n’ai encore rien fait, c’est d’abord à cause de ma maladie, puis parce que, ne vous ayant pas encore vu, je pensais que vous aviez renoncé à la chose. Mais, puisque vous avez l’amabilité de venir me voir personnellement, il faut bien que je vous dise toute la vérité, la désagréable vérité. Vous êtes engagé comme arpenteur, ainsi que vous le dites, mais malheureusement nous n’avons pas besoin d’arpenteur. Il n’y aurait pas pour vous le moindre travail ici. Les limites de mes petits domaines sont toutes tracées, tout est cadastré fort régulièrement. Il ne se produit guère de changement de propriétaire ; quant à mes petites disputes au sujet des limites, nous les liquidons en famille. Que ferions-nous dans ces conditions d’un arpenteur ?

Bien qu’il n’y eût encore jamais réfléchi, K. se trouvait convaincu dans son for intérieur qu’il s’était toujours attendu à une déclaration de ce genre. Ce fut ce qui le rendit capable de répondre immédiatement :

– Voilà qui me surprend beaucoup. Cela renverse tous mes calculs. Je ne puis qu’espérer qu’il y a là une méprise.

– Hélas non, répondit le maire, la situation est telle que je vous la dépeins.

– Mais comment cela est-il possible ! s’écria K., je n’ai tout de même pas fait cet interminable voyage pour être
encore renvoyé !
” (Franz Kafka, le château, folio, p. 91-92).

K va produire sa lettre d’engagement au Maire. Cela ne changera rien. On lui fait bien comprendre qu’il est étranger et que les problèmes de limites de terrain se règle entre eux. Bien comprendre ici, que le texte parle d’une lutte des classes, entre une oligarchie qui règle ses conflits en interne et un prolétariat qui ne peut jamais accéder aux hautes sphères du pouvoir. Nous sommes au cœur de la problématique kafkaïenne. Elle traverse toutes son œuvre.

Mizzi vint ; elle parut encore plus terne et insignifiante quand elle se trouva assise au bord du lit, pressée contre
cet homme fort et éclatant de vie, qu’elle tenait presque embrassé. Seul son petit visage frappait, dans la lumière
de la bougie, avec ses traits nets et sévères que l’âge avait à peine adoucis. Elle n’eut pas plus tôt jeté les yeux sur la
lettre qu’elle joignit les mains légèrement : de Klamm ! dit-elle. Puis ils lurent la lettre ensemble, échangèrent
quelques mots à voix basse et finalement, juste au moment où les deux aides criaient : « Hourra ! » car ils venaient de réussir à fermer la porte de l’armoire et Mizzi leur adressait un regard de reconnaissance muette, le maire dit :

– Mizzi partage entièrement mon opinion et je puis bien maintenant vous la communiquer. Cette lettre n’est pas un écrit officiel, mais un document d’ordre privé. La suscription « Monsieur » suffirait à le montrer. De plus nul mot n’y dit que vous soyez engagé comme arpenteur, il n’est question que du « service du comte » en général ; encore n’est-ce pas exprimé d’une façon qui engage le signataire, vous êtes pris « comme vous le savez », c’est-à-dire que la charge de faire la preuve vous incombe. Enfin, en matière de service, c’est à moi uniquement que vous avez à vous adresser, à moi le maire qui doit vous renseigner, ce qui est déjà fait dans l’ensemble. Pour quelqu’un qui sait lire les pièces officielles, à plus forte raison celles qui ne le sont pas, tout cela crève les yeux. Que vous, un étranger, vous ne l’ayez pas compris, je n’en suis pas étonné. En gros cette lettre n’a pas d’autre sens que de vous montrer que Klamm a l’intention de s’occuper de vous au cas où vous entreriez au service du comte.” (Franz Kafka, le château, folio, p. 108-109).

Il va s’ensuivre une discussion fort courtoise où K va seulement contester le refus du Maire et s’étonner de l’erreur administrative. Il faut lire le chapitre V en entier pour s’apercevoir de la politesse et de la courtoisie de K. Il remet en cause la compétence de l’administration d’une façon polie. Et pourtant.

K. se trouva seul avec l’instituteur qui avait repris silencieusement sa place à table ; il le laissa attendre encore un peu, ôta sa chemise et commença à se laver dans la cuvette. Ce ne fut qu’alors, le dos tourné, qu’il lui demanda le motif de sa venue.

– Je viens de la part de Monsieur le Maire, répondit l’instituteur.

K. dit qu’il était prêt à l’écouter. Mais, comme le clapotis de l’eau empêchait de l’entendre nettement, l’instituteur dut se rapprocher, il s’appuya au mur, tout près de K. ; K. s’excusa de son impatience et de sa lessive sur l’urgence de la visite qu’il projetait. L’instituteur passa là-dessus et dit seulement :

Vous avez été impoli avec Monsieur le Maire, ce vieil homme respectable qui a tant de mérite et d’expérience.

– Je ne savais pas que j’eusse été impoli, dit K. en se séchant, mais il est vrai que pendant notre entretien, j’avais d’autres soucis que celui des belles manières, car il y allait de mon existence menacée par le honteux fonctionnement d’une administration dont je n’ai pas à vous dépeindre le détail puisque vous en êtes un membre
actif. Le Maire s’est-il plaint de moi ?

– À qui donc auriez-vous donc voulu qu’il se plaignît ? demanda l’instituteur, et, même s’il avait quelqu’un sous
la main, se plaindrait-il jamais ? Non, mais j’ai eu à établir sous sa dictée un petit procès-verbal de votre entrevue
qui m’en a suffisamment appris sur sa bonté et sur le ton de vos réponses.

Tout en cherchant son peigne, que Frieda avait dû ranger Dieu savait où, K. répondit :

Comment ? Un procès-verbal ? Dressé après coup ! En mon absence ! Et par quelqu’un qui n’assistait pas à
l’entrevue ! Ce n’est pas mal ! Et pourquoi un procèsverbal ? Notre entretien était-il donc officiel ?

Non, dit l’instituteur, mais semi-officiel, tout comme mon procès-verbal. On n’a dressé ce procès-verbal que
pour la bonne règle. En tout cas maintenant il existe, et il ne vous fait pas honneur.

K., ayant enfin trouvé le peigne qui avait glissé dans le lit, dit plus calmement :

– Il existe ! Est-ce pour m’annoncer cela que vous êtes venu ?

– Non, dit l’instituteur, mais je ne suis pas un automate, et je ne pouvais pas m’empêcher de vous dire ma façon de penser. Ma mission, elle, n’est qu’une nouvelle preuve de la bonté de Monsieur le Maire ; bonté que je ne puis comprendre, j’y insiste ; et si j’exécute la mission que m’a confiée Monsieur le Maire, c’est uniquement pour remplir les devoirs de la profession et par respect pour Monsieur le Maire.” (Franz Kafka, le Château, folio, p. 134-136)

Le cas de figure posé par Kafka dans son roman, c’est l’outrage sur un agent dépositaire de l’autorité publique. L’arme de guerre de la dictature pour faire taire un interlocuteur. Il faut distinguer l’injure, la diffamation (A) de l’outrage (B).

A. L’injure et la diffamation.

La loi de 1881 sur la liberté (sic) de la presse interdit la diffamation et l’injure :

Toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation. La publication directe ou par voie de reproduction de cette allégation ou de cette imputation est punissable, même si elle est faite sous forme dubitative ou si elle vise une personne ou un corps non expressément nommés, mais dont l’identification est rendue possible par les termes des discours, cris, menaces, écrits ou imprimés, placards ou affiches incriminés.

Toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait est une injure.” (Article 29, loi du 29 juillet 1881).

La diffamation concerne un propos mensonger porté contre une personne sans preuve. La qualification est assez simple à définir. Soit vous pouvez prouver ce que vous dites et il n’y a pas diffamation, soit vous ne pouvez pas le prouver et il y a diffamation. Par exemple dire que Pierre-Yves Rougeyron est franc-maçon peut être une diffamation si je ne produis aucune preuve à l’appui de mon propos.

L’injure relève des propos outrageant, méprisant qui ne comporte aucun fait précis. Un des exemples le plus célèbre concerne Jean-Marie Le Pen. Je sais encore lui. Aujourd’hui, j’ai deux obsessions (et moi, vous le savez déjà, lorsque j’ai une obsession), Jean-Marie Le Pen et Pierre-Yves Rougeyron. Bon enfin bref. Revenons a nos moutons.

Le 2 septembre 1988 à l’Université d’été du Cap d’Agde, le Président du Front National va prononcer un discours que je reprends mot pour mot.

Monsieur Durafour, obscur ministre de l’ouverture dans laquelle il a immédiatement disparu, a déclaré : nous devons nous allier aux élections municipales, y compris avec le Parti communiste, car le parti communiste, lui, perd des forces, tandis que l’extrême droite ne cesse d’en gagner ; M. Durafour crématoire, merci de cet aveu.

Monsieur Durafour n’ayant pas porté plainte contre Jean-Marie Le Pen, fut quand même poursuivi par le parquet sur le fondement de l’injure publique.

Il fut relaxé par la Cour d’Appel de Versailles :

L’expression incriminée a été inspirée par la dernière syllabe du nom patronymique de la personne visée et que ni la personnalité privée de celle-ci ni sa carrière politique ne pouvaient donner à penser à l’auditoire que M. Durafour pourrait la ressentir comme une atteinte liée à l’évocation des crimes nazis que certes l’expression appelle.

La dernière syllabe du nom de famille du ministre (four) associé à crématoire est un jeu de mots qui renvoi aux crimes de guerre des nazis. C’est incontestable, mais c’est une blague, un calembour, certes de mauvais goût, mais un calembour qui fait partie de la tradition française, comme le dit si justement la Cour d’Appel. Il ne pouvait donc y avoir d’injure publique.

il convient d’analyser cette expression comme un calembour, proféré en période préélectorale, contre un adversaire politique qui n’avait pas caché sa volonté d’éliminer un parti opposant, et qu’il est conforme à la tradition française dans un tel contexte, le débat fût-il violemment polémique, de ne pas l’entraver par une conception étroite de la susceptibilité des personnes qui acceptent de se trouver exposées à la contradiction ; que les juges ajoutent que les limites de la tolérance usuellement admise en la matière n’ont pas été dépassées, d’aussi mauvais goût que fût ledit calembour.

La Cour de cassation va pourtant casser la décision, en retenant que le calembour portait sur un ministre. Qu’il est important de tenir compte de la délicatesse d’un ministre. Un ministre est une personne particulière au sein de la République, comme le maire du château. Jean-Marie Le Pen comme K auraient dû tenir compte de la susceptibilité (c’est la même chose que la délicatesse) du ministre ou du maire du village. Il y a des gens qui sont supérieures aux autres. Nier cette évidence, c’est être violent.

l’adjonction de l’épithète crématoire au patronyme de Michel Y… évoquait les crimes contre l’humanité perpétrés par les adeptes du nazisme, et portait ainsi atteinte à la délicatesse de la personne invectivée, à raison de sa qualité de ministre.

Une décision historique qui marque un tournant majeur dans l’histoire politique française. Une guerre sémantique va être menée contre l’esprit français par des associations communautaires dont la “cancel culture” et le “woke” est la continuatrice moderne.

B. L’outrage.

L’outrage se distingue de l’injure et de la diffamation par son caractère privé. Si les propos sont tenus en public, c’est de l’injure et de la diffamation. Si c’est privé c’est de l’outrage.

Attardons-nous plus longuement sur l’outrage qui est l’arme la plus utilisée par les dictatures pour faire taire ses opposants. Elle est d’une redoutable efficacité comme le montre l’exemple du roman de Kafka.

J’aime refaire l’histoire d’une notion afin de bien percevoir l’évolution sur une longue durée. C’est essentiel pour bien comprendre. C’est l’une de mes technique de travail.

Remontons donc à l’époque de l’Empire romain.

Il faut bien comprendre que l’outrage est une infraction de nature religieuse. Sous l’Ancien Régime, elle concernait la personne du Roi (le crime de lèse-majesté) ou le monde religieux (le blasphème). Le Roi par le sacre de Reims était considéré comme le représentant de Dieu sur terre. Pour cette raison, il était interdit de le toucher par des mots ou par un contact physique. C’était le crime absolu qui était puni avec la plus grande sévérité. L’exemple de Damiens le montre bien. Il avait osé effleura Louis XV avec un couteau et du subir un effroyable châtiment.

Lorsqu’on vous parle d’outrage, nous sommes pleinement dans le domaine religieux. Les personnes que la loi (autre mot de nature religieuse) protège contre l’outrage se considèrent comme investies d’une mission quasi-divine. Pour cette raison, ils considèrent qu’un simple citoyen (un gueux) n’a pas le droit de critiquer son travail, de le contredire ou même de simplement d’émettre une réserve sur sa décision. L’accusation d’outrage prend une dimension particulière d’interdiction de la critique, une critique qui revient à remettre en cause l’infaillibilité de celui qui se pense au-dessus des lois.

Le crime de lèse-majesté reprend à son compte un vieux concept du droit romain, le “crimen maiestatum“. La “maiestas”, en latin, c’est la grandeur du peuple romain dans son ensemble comme nous l’explique Tacite dans ses “annales“.

On décerna cette année les ornements du triomphe à Cécina, à L. Apronius et à C. Silius, pour la part qu’ils avaient eue aux succès de Germanicus. Tibère refusa le nom de Père de la patrie, dont le peuple s’obstinait à le saluer ; et, malgré l’avis du sénat, il ne permit pas qu’on jurât sur ses actes, affectant de répéter “que rien n’est stable dans la vie, et que, plus on l’aurait placé haut, plus le poste serait glissant.” Et cependant cette fausse popularité n’en imposait à personne. Il avait remis en vigueur la loi de majesté ; loi qui chez les anciens, avec le même nom, embrassait des objets tout différents, trahisons à l’armée, séditions à Rome, atteinte portée par un magistrat prévaricateur à la majesté du peuple romain. On condamnait les actions, les paroles restaient impunies : Auguste le premier étendit cette loi aux libelles scandaleux, indigné de l’audace de Cassius Sévérus, dont les écrits insolents avaient diffamé des hommes et des femmes d’un rang illustre. Dans la suite Tibère, consulté, par le préteur Pompéius Macer, s’il fallait recevoir les accusations de lèse-majesté, répondit que les lois devaient être exécutées. Lui aussi avait été aigri par des vers anonymes qui coururent alors sur sa cruauté, son orgueil, et son aversion pour sa mère.” (Tacite, Annales, I, LXXII).

Auguste puis Tibère vont modifier le principe du “crimen maiestatum” en l’appliquant à la personne de l’Empereur comme le montre un extrait des “vies des douze Césars” de Suétone au sujet de Tibère.

Vers le même temps, comme un préteur demandait à Tibère s’il voulait faire poursuivre les crimes de lèse-majesté, il répondit « qu’il fallait appliquer les lois », et il les appliqua de la manière la plus atroce. Quelqu’un avait enlevé la tête d’une statue d’Auguste pour lui en substituer une autre ; l’affaire fut débattue au Sénat et, comme il y avait doute, on eut recours à la torture. L’inculpé ayant été condamné, ce genre d’accusation fut insensiblement porté si loin qu’on fit un crime capital même d’avoir battu un esclave ou changé de vêtements près d’une statue d’Auguste, d’avoir été aux latrines ou dans un lieu de débauche avec une pièce de monnaie ou une bague portant son effigie, d’avoir critiqué l’une de ses paroles ou de ses actions. Enfin on alla jusqu’à faire périr un citoyen qui s’était laissé investir d’une magistrature dans sa colonie, le même jour où l’on avait autrefois décerné des charges à Auguste.” (Suétone, Vies des douze Césars, « Tibère », LVIII)

Les papes, les empereurs et les rois reprendront à leurs comptes le principe de “crimen maiestatum”. En 1199, le pape Innocent III par la décrétale “vergentis in senium” en incluant les aspects religieux dans le crime de lèse-majesté. Désormais, les hérésies, les blasphème et le sacrilège seront punie sur le même fondement.

Avec la Révolution française, et son code pénal de 1791, le crime de lèse-majesté va être aboli et remplacé par celui de crime d’offense à la loi et d’outrage.

Lorsqu’un ou plusieurs agents préposés, soit à l’exécution d’une loi, soit à la perception d’une contribution légalement établie, soit à l’exécution d’un jugement, mandat, d’une ordonnance de justice ou de police ; lorsque tout dépositaire quelconque de la force publique, agissant légalement dans l’ordre de ses fonctions, aura prononcé cette formule : Obéissance à la loi ;

Quiconque opposera des violences et voies de fait, sera coupable du crime d’offense à la loi, et sera puni de la peine de deux années de détention.” (article 1, section IV, titre I, 2e partie)

Quiconque aura outragé un fonctionnaire public en le frappant au moment où il exerçait ses fonctions, sera puni de la peine de deux années de détention.” (article 7, section IV, titre I, 2e partie)

Ne sont visé que les actes de violence. Il faudra attendre le code pénal de 1810 pour que soit réintroduit l’outrage par les mots et les gestes.

Lorsqu’un ou plusieurs magistrats de l’ordre administratif ou judiciaire auront reçu dans l’exercice de leurs fonctions, ou à l’occasion cet exercice, quelque outrage par paroles tendant à inculper leur honneur, ou leur délicatesse, celui qui les aura ainsi outragés sera puni d’un emprisonnement d’un mois à deux ans.

Si l’outrage a eu lieu à l’audience d’une cour ou d’un tribunal, l’emprisonnement sera de deux à cinq ans.” (article 222 ancien code pénal).

L’outrage fait par gestes ou menaces à un magistrat dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions, sera puni d’un mois à six mois d’emprisonnement ; et si l’outrage a eu lieu à l’audience d’une cour ou d’un tribunal, il sera puni d’un emprisonnement d’un mois à deux ans.” (article 223 ancien code pénal).

L’outrage fait par paroles, gestes ou menaces à tout officier ministériel, ou agent dépositaire de la force publique, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions, sera puni d’une amende de seize francs à deux cents francs.” (article 224 ancien code pénal).

Le nouveau code pénal de 1994 reprend la même idée à l’article 433-5 :

Constituent un outrage puni de 7 500 euros d’amende les paroles, gestes ou menaces, les écrits ou images de toute nature non rendus publics ou l’envoi d’objets quelconques adressés à une personne chargée d’une mission de service public, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de sa mission, et de nature à porter atteinte à sa dignité ou au respect dû à la fonction dont elle est investie.

Lorsqu’il est adressé à une personne dépositaire de l’autorité publique, l’outrage est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

Lorsqu’il est adressé à une personne chargée d’une mission de service public et que les faits ont été commis à l’intérieur d’un établissement scolaire ou éducatif, ou, à l’occasion des entrées ou sorties des élèves, aux abords d’un tel établissement, l’outrage est puni de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende.

Lorsqu’il est commis en réunion, l’outrage prévu au premier alinéa est puni de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende, et l’outrage prévu au deuxième alinéa est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende.” (Article 433-5 du Code Pénal).

Là où, de l’époque romaine jusqu’à la révolution de 1789, seul l’Empereur, le Pape ou le Roi pouvaient poursuivre un récalcitrant, avec l’outrage moderne, n’importe quel imbécile avec un uniforme de juge, de policier ou de gendarmes peut invoquer cet article lorsqu’il se sent “outragée” par un mot, un geste ou une menace. C’est la porte ouverte a tout les abus.

D’ailleurs depuis quelques années, nous assistons à une explosion des plaintes pour outrages. Si nous regardons les chiffres publiés par le ministère de l’Intérieur, entre 1996 (17 602 infractions constatées) et 2020 (28 591 infractions) on observe une augmentation de 75% en vingt-cinq ans. Les chiffres sont ceux de l’état 4001, index 72 publié sur le site du ministère de l’Intérieur.

L’augmentation s’explique par le comportement de la police qui a compris tout l’intérêt du système. Le dépôt d’une plainte permet une condamnation quasi-automatique par le tribunal (souvent solidaire de la police) et un substantiel complément de revenue. Très souvent, le policier reçoit 750 euros de dommage et intérêt sans que la procédure ne lui coût rien, car les frais d’avocat son prit en charge par l’Etat.

La crise des gilets jaunes démontre cette utilisation de l’outrage comme arme politique contre l’opposition. Elle permet de voir une augmentation massive des plaintes pour outrage sur un an. Une augmentation de 76 % en un an entre 2017 et 2018 sur la phase 1 (dite P1 dans les tableaux). La phase 1 concerne la période la plus violente du mouvement, celle où la république à failli vaciller (entre le 17 novembre 2018 et le 29 décembre 2018).

On découvre que la répression fut surtout un phénomène qui marqua de petites villes de province, cette France périphérique dont parlait Christophe Guilluy. Pour la phase 1, nous avons : Quimper (+1400% d’augmentation), Charleville-Mezières (+800%) ou Tarbes (+688%). Alors que le phénomène va très nettement s’urbaniser dans les phase 2 et 3.

Il faut conclure en expliquant que traditionnellement, l’outrage concernait aussi la protection des bonnes mœurs.

Toute personne qui aura commis un outrage public à la pudeur sera punie d’un emprisonnement de trois mois à deux ans, et d’une amende de 500 F à 15000 F.” (article 330 ancien code pénal)

L’outrage à la pudeur ne sera pas repris dans le nouveau code pénal de 1994 et remplacé par le délit d’exhibition sexuelle (article 222-32) ce qui en limite considérablement le domaine.

Tien d’ailleurs. Petit pause Rougeyron. Oui encore… je sais…

Pourquoi Pierre-Yves (lâchons-nous) porte-t-il deux alliances comme le président Emmanuel Macron. Une alliance à chaque main. l’une pour indiquer son mariage “officiel” avec une femme et l’autre pour… Je vous laisse deviner.

Nous avons exploré ensemble les abysses et les sommets des techniques de manipulation mentale, un voyage qui, nous l’espérons, vous a offert des clés de compréhension essentielles sur les forces invisibles qui modèlent notre perception du monde. Mais l’aventure ne s’arrête pas là, et votre voix compte dans cette exploration continue de la conscience humaine.

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