X-17 : Madame Royal et Marie-Antoinette (1793).

La Royne Ergaste voyant sa fille blesme,

Par un regret dans l’estomach enclos :

Cris lamentables seront lors d’Angolesme,

Et au germain mariage fort clos.

L’Orpheline du Temple.

Marie-Antoinette (« la Royne ») lors de son incarcération (« ergaste ») verra (« voyant ») sa fille, Madame Royal (« sa fille ») le visage blême (« blesme »). Elle aura l’estomac noué par l’angoisse et la peur (« par un regret dans l’estomach enclos ») lorsqu’elle apprendra la mort de son père. On entendra (« seront lors ») des cris et des lamentations (« cris lamentables ») de la jeune princesse d’Angoulême (« d’Angolesme »).

Madame royale était mariée avec le duc d’Angoulême depuis 1787, alors qu’elle était âgée de seulement neuf ans. Ce qui explique l’utilisation du terme Angoulême par Nostradamus. Le duc était son cousin germain (« et au germain ») et le mariage ne fut jamais consommé (« mariage forclos »).

Notons que le numéro du quatrain est une allusion à la Révolution russe où une scène similaire eux lieu avec Nicolas II, sa femme et ses quatre enfants.

Article Wikipédia Marie-Thérèse de France.

Marie-Thérèse Charlotte de France, surnommée « Madame Royale », née le à Versailles et morte le à Frohsdorf en Autriche, est le premier enfant de Louis XVI et Marie-Antoinette. Après une enfance passée à la Cour, elle est la seule des enfants royaux à survivre à la Révolution française. Condamnée par les insurgés puis réduite à l’exil, Marie-Thérèse Charlotte, devenue Dauphine de France en 1824, puis une éphémère reine de France lors des journées de 1830, reste attachée à la monarchie jusqu’à la fin de sa vie. C’est en exil sous le titre de courtoisie de « comtesse de Marnes » qu’elle décède le à Frohsdorf en Autriche.

Scrutée une bonne partie de sa vie aussi bien par ses admirateurs que par ses détracteurs, rendant compte de ses faits et gestes quotidiens pour mieux la réinventer, Madame Royale devient bien malgré elle l’héroïne de chansons, de poèmes, de récits au goût du jour voire d’insultes. C’est ainsi qu’on la lia pendant longtemps à l’énigme de la Comtesse des Ténèbres. Aujourd’hui, les analyses ADN ont démontré qu’il ne pouvait cependant y avoir identité de personnes entre la Comtesse des Ténèbres et la duchesse d’Angoulême.

Madame Royale a profondément marqué les esprits de son époque. Chateaubriand a écrit d’elle  : « Ses souffrances sont montées si haut qu’elles sont devenues une des gloires de la France ». De même, la duchesse de Dino, non sans lucidité affirmait : « Jamais une femme dans l’histoire ne fut plus poursuivie par le malheur ».

Marie Thérèse Charlotte de France est appelée « Madame » ou « Madame Royale », sa mère l’appelant toutefois par le surnom de « Mousseline la Sérieuse ». Elle est le premier enfant de Louis XVI et de Marie-Antoinette, né après plus de huit ans de mariage.

Sa naissance est attendue et saluée par le peuple français, et l’on entonne des Te Deum dans toutes les églises du royaume pour la célébrer. Sa naissance paraît cependant suspecte, le couple royal n’arrivant pas à procréer depuis plusieurs années, ce qui fait naître la rumeur de bâtardise de l’enfant, la paternité de la princesse étant attribuée au comte d’Artois ou au duc de Coigny.

Marie-Thérèse est baptisée le , jour de sa naissance, dans la chapelle du château de Versailles par le cardinal-évêque de Strasbourg Louis de Rohan, grand aumônier de France, en présence d’Honoré Nicolas Brocquevielle, curé de l’église Notre-Dame de Versailles : son parrain est un cousin de son père, le roi Charles III d’Espagne, représenté par Louis Stanislas Xavier de France, comte de Provence, et premier dans l’ordre de succession. Sa marraine est sa grand-mère maternelle, l’impératrice-douairière Marie-Thérèse, représentée par la comtesse de Provence.

La princesse royale Marie-Thérèse-Charlotte, couramment appelée par son troisième prénom, connut une enfance de fille de France dans une cour de Versailles unique en son genre. De nombreux écrits, notamment les mémoires de la baronne d’Oberkirch, témoignent du caractère orgueilleux de la jeune princesse, que Marie-Antoinette se souciait beaucoup de corriger.

C’est une enfant de dix ans qui se trouve confrontée aux violences de la révolution lors de l’installation forcée de sa famille au palais des Tuileries à Paris le . Lors de chaque émeute, Marie-Thérèse avait l’impression qu’elle et sa famille allaient être assassinés.

Le comte de Fersen convainc le roi et la reine de s’enfuir (épisode de Varennes-en-Argonne) le . La famille royale (le roi, déguisé en valet, la reine, déguisée en chambrière, la sœur du roi, Madame Élisabeth, le dauphin habillé en fille, Marie-Thérèse et la marquise de Tourzel, gouvernante des enfants) se font prendre et sont ramenés, non sans risque pour leur vie, au château, puis, après une dernière émeute, le , emprisonnés à la prison du Temple (“La Royne Ergaste“).

À cause du peu de vêtements dont elle dispose, « Thérèse Capet » apprend à les raccommoder tous les soirs. Elle vient d’avoir quatorze ans quand, à l’issue de son procès, le roi déchu est condamné à mort. Elle commence en janvier 1793, peu avant l’exécution de son père, à écrire ses mémoires. En septembre de la même année, l’ex-reine sa mère est transférée à la prison de la Conciergerie et elle est séparée de son petit frère Louis XVII qui a 8 ans (“sa fille blesme Par un regret dans l’estomach enclos Cris lamentables“).

Tant que l’attention de tous est fixée sur les souverains déchus, les enfants restent dans l’ombre. Après l’exécution du roi le 21 janvier et de sa mère le , la jeune princesse reste seule avec sa tante paternelle, Madame Élisabeth, 28 ans, et son jeune frère Louis, âgé de 8 ans.

La situation change : les survivants, Marie-Thérèse, son frère et leur tante, ne peuvent être jugés pour des crimes politiques dont ils sont innocents. Ils sont dès lors enfermés pour ce qu’ils représentent : il s’agit de les séparer.

Le , Madame Élisabeth est à son tour guillotinée et le jeune Dauphin meurt à l’âge de 10 ans, des suites de mauvais traitements et de tuberculose le .

De tout cela Marie-Thérèse, coupée du monde, ne sait rien.

Après l’exécution de Robespierre en juillet 1794 et la fin de la Terreur, la princesse reçoit la visite de Barras et les conditions de captivité s’améliorent. On lui apporte du linge et Laurent –gardien de Louis XVII – assure également la surveillance de Madame Royale qui lui reconnaît beaucoup de gentillesse. Le roi d’Espagne demande à récupérer ses cousins, les « enfants Capet » mais rien n’aboutit.

Dès la mort de son frère le 8 juin 1795, on songe plutôt à l’échanger contre des prisonniers républicains retenus en Autriche. En attendant que les pourparlers aboutissent, on donne à la princesse une jeune femme pour lui tenir compagnie, Mme de Chanterenne que Marie-Thérèse surnomme affectueusement « Rénette ». C’est à elle que revient la lourde tâche d’annoncer à Madame Royale la mort de sa mère, de sa tante et de son frère. Courageuse, elle puise dès lors un grand réconfort moral dans sa foi et dans la présence de sa chère « Rénette ».

Parallèlement, le tribunal révolutionnaire permet que Marie-Thérèse reçoive la visite quotidienne d’une mystérieuse « cousine ». Il s’agit de Stéphanie-Louise de Montcairzin (anagramme de Conti et Mazarin) qui se prétend née des amours illégitimes du prince de Conti et de Louise-Jeanne de Durfort, duchesse de Mazarin. Ces visites se poursuivent jusqu’au 26 août 1795 où on lui refuse subitement tout accès à la prison du Temple dans l’incertitude de son identité réelle.

En tant qu’unique rescapée de la famille royale stricto sensu, la timide princesse devint alors bien malgré elle, une véritable « célébrité ». Pour tous c’est « l’Orpheline du Temple », nom qui ne la quitte plus. Ses admirateurs vont ainsi jusqu’à louer un appartement en face du Temple : on la scrute pour rendre compte de ses faits et gestes quotidiens et mieux la réinventer. Plus largement, on en fait l’héroïne de chansons, de poèmes et de récits au goût du jour (roman noir, ballades à la manière d’Ossian), qui ont sa souffrance et son histoire, et non son rang, pour principal ressort. Elle devient alors le meilleur agent de propagande des royalistes, instrument politique, certes, mais un instrument révéré et adoré de ses partisans et ce durant toute sa vie.

La Convention trouve la fille de Louis XVI de plus en plus encombrante. Garder la princesse en prison ne se justifie plus aux yeux de l’opinion, tandis que des complots peuvent se nouer autour du Temple. En effet, tout en conservant à la monarchie son caractère héréditaire, la constitution de 1791 avait vidé en revanche de leur sens politique et mystique les notions de « maison », de « dynastie » ou de « sang ». La question de son accession au trône devient ainsi un véritable serpent de mer de la vie politique de l’époque. La libérer et la garder en France devient impensable.

On souhaite donc l’envoyer à l’étranger. À aucun moment on n’envisage de la rendre à son oncle, le futur Louis XVIII, et aucun journal ne fait mention d’un tel projet : le Prétendant est tenu à l’écart à la fois par le gouvernement et par les royalistes modérés. Pendant tout le mois de juin 1795, les journaux parlent surtout d’un exil en Espagne, ce qui paraît à bien des égards plus logique : les souverains espagnols sont aussi des Bourbons, avec lesquels la République est en paix. Toutefois, l’Autriche présente sur cette solution un avantage immédiat : les Autrichiens retiennent prisonniers plusieurs députés français, pris par traîtrise : on pourrait faire l’échange. Le 12 messidor an III (30 juin 1795), la Convention vote un décret prévoyant que la fille de Louis XVI soit échangée contre les prisonniers politiques détenus par l’Autriche, sans que cette dernière ait jamais été consultée.

Acculé, l’empereur François II accepte de recevoir sa cousine. Les négociations traînent mais la princesse est finalement échangée contre des prisonniers français (Pierre Riel de Beurnonville, Jean-Baptiste Drouet, Hugues-Bernard Maret, Armand-Gaston Camus, Nicolas-Marie Quinette et Charles-Louis Huguet de Sémonville) capturés par l’armée autrichienne. Elle quitte la prison du Temple de nuit le jour de ses dix-sept ans () pour se rendre à Bâle, où elle est remise aux envoyés de l’empereur François II. Ainsi, elle passa une nuit dans la ville de Huningue, une forteresse française conçu par Vauban, à la frontière (France, Suisse et Allemagne).

Elle fut accompagnée de François Hüe (1757-1819), huissier de la Chambre de Louis XVI, qui avait suivi la famille royale à la prison du Temple. Il resta avec elle à Vienne.

En quittant la France, elle aurait versé des larmes, ne tenant aucune rigueur aux Français pour ses malheurs comme elle l’écrit dans ses mémoires.

À Vienne, Marie-Thérèse-Charlotte rencontre sa pléthorique famille maternelle à laquelle elle est assez vite intégrée, même si elle tient l’empereur François II, son cousin germain, pour responsable de la mort de sa mère, en raison de son inaction. Elle éprouve davantage encore de difficultés avec les émigrés français qui se trouvent en Autriche. Ils appartiennent généralement à la haute noblesse partie de France depuis longtemps et pour cette raison, elle les considérait le plus souvent comme des traîtres. Ceux-ci attendent pourtant que la princesse leur livre des témoignages sur ses malheurs passés, les encourage dans leur cause et les aide matériellement, alors que Marie-Thérèse semble surtout vouloir oublier et ne peut rien faire sans l’accord de l’empereur. Les réactions sont donc mitigées. Si les émigrés lui conservent leur affection et leur admiration, ils sont néanmoins un peu déçus.

Son séjour forcé à Vienne la rendit froide et maussade tandis que l’oncle de la princesse, Louis XVIII, alors en exil à Vérone, ne se résout pas à la voir entre les mains de l’empereur.

Pendant son séjour à Vienne, Marie-Thérèse met en lumière les tensions entre logiques dynastiques et logiques nationales au tournant des XVIIIe et XIXe siècles. En refusant d’épouser le frère de l’empereur d’Autriche, l’archiduc Charles-Louis, valeureux officier, mais « un ennemi de la France », elle assoit sa réputation de princesse « française », ce que la propagande royaliste instrumentalise à la Restauration.

Grâce à l’entremise du tsar de Russie Paul Ier, Marie-Thérèse accepte finalement d’épouser à vingt ans l’héritier de la couronne de France déchue, un autre de ses cousins germains (“Et au germain mariage fort clos“), Louis-Antoine d’Artois, fils aîné du futur Charles X et duc d’Angoulême (“seront lors d’Angolesme“). En juin 1799, elle quitte la cour de Vienne pour rejoindre son oncle et son futur époux réfugiés sous la protection du Tsar au château de Mittau en Courlande (aujourd’hui Jelgava en Lettonie ). Le , Louis-Joseph de Montmorency-Laval, évêque de Metz et grand aumônier de France célèbre le mariage, en présence du futur Louis XVIII et de son épouse Marie-Joséphine de Savoie. L’abbé Henri Edgeworth de Firmont qui avait accompagné Louis XVI jusqu’à l’échafaud a tenu également à être présent lors de la cérémonie pour bénir le couple princier. L’acte de mariage est rédigé par le comte de Saint-Priest.

À partir de ce moment, l’existence de Madame royale se trouve étroitement liée à celle de son oncle Louis XVIII dont elle partage l’exil et qui utilise son image de « martyr de la Révolution » pour rallier les royalistes et intéresser les souverains européens à sa cause. En fait, Marie-Thérèse partage davantage la vie de son oncle que celle de son propre époux. Louis XVIII a besoin d’assurer la légitimité de droit, dont il est porteur par la loi salique, par la légitimité de fait que détient sa nièce. Il fait alors d’elle l’héritière des vertus de ses parents, puis une « nouvelle Antigone » fidèle au roi dans tous ses malheurs, comme tout royaliste se devrait de l’être. Madame devient alors celle qui montre la voie de la fidélité monarchique. C’est déjà la véritable reine de la petite cour en exil, même si l’épouse de Louis XVIII, Marie-Joséphine de Savoie, est en vie.

En France, des journaux, des portraits, des « pèlerinages » à la prison du Temple perpétuent le souvenir de « l’Orpheline » au moins jusqu’au coup d’État de Fructidor (4 septembre 1797).

La princesse devient aussi une héroïne de roman. Sa captivité, ses souffrances sont des thèmes propices au roman noir très en vogue alors. En 1799 la baronne de Méré publie Irma ou les malheurs d’une jeune orpheline, qui reprend le cours des malheurs de la princesse, les transposant en Inde, avec des noms en anagramme et les clefs à la fin du dernier volume ; le succès est si considérable qu’il décourage la censure. Deux romans de Jean-Baptiste Regnault-Warin : le cimetière de la Madeleine et surtout Les Prisonniers du Temple, parus en 1800 et 1801, poursuivent le phénomène.

Le mariage de Madame Royale, célébré par tous les royalistes comme un signe d’espoir, fut pourtant bien vite avorté puisqu’il est suivi de nombreuses années d’exil en Pologne, puis de nouveau en Courlande. En 1807, perdant tout espoir de revenir en France, les Bourbons gagnent l’Angleterre et s’installent à Hartwell : Marie-Thérèse, âgée de 29 ans, y retrouve avec joie son beau-père et son beau-frère, le duc de Berry.

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