VIII-68 : Richelieu et la conspiration de Cinq-Mars (1642).

Image illustrative de l'article Armand Jean du Plessis de Richelieu
Richelieu, par Philippe de Champaigne.

Le vieux Cardinal de Richelieu (« Vieux Cardinal ») se verra supplanté et désarmé (« deceu ») par le jeune Cinq-Mars (« par le jeusne »), le 13 mars 1642. Il perdra la faveur de Louis XIII (« Hors de sa charge se verra desarmé »).

Quelque temps plus tard, Richelieu recevra alors qu’il est à Arles (« Arles »), une copie du traité signé par Cinq-Mars avec l’Espagne derrière le dos du souverain (« ne monstres double soit apperceu »). Il le transmettra à Louis XIII afin de revenir en faveur.

Le Cardinal remontera le Rhône (« Et liqueduct »), en passant par Tarscon et Lyon, avec Cinq-Mars prisonnier, malade et couché dans un lit. Il mourra deux mois plus tard à Paris, le 4 décembre 1642 (« embausmé »). Louis XIII mourra quelque temps plus tard, le 14 mai 1643 (« & le Prince »). Ils seront tous les deux embaumés, suivant l’usage antique (« embausmé »).

Cinq-Mars rendant son épée à Louis XIII par Claudius Jacquand.

Article Wikipédia Conspiration de Cinq-Mars.

La conspiration de Cinq-Mars, du nom de son instigateur, est une conspiration qui eut lieu en 1642 en France, et fut dirigée directement contre le cardinal de Richelieu (“Vieux Cardinal par le jeusne deceu“), premier ministre de Louis XIII, et indirectement contre ce dernier, qui soutenait son ministre.

Dirigée par Henri Coiffier de Ruzé d’Effiat, marquis de Cinq-Mars, elle fut démasquée, et ses membres poursuivis et condamnés ou exilés. Ce fut la dernière conspiration active contre Richelieu, qui décèda à la fin de l’année.

La politique du cardinal de Richelieu vise à l’établissement définitif d’un pouvoir monarchique, et donne donc lieu à une lutte contre les grands féodaux, favorables à un pouvoir central faible. De nombreuses conspirations dirigées par la haute noblesse sont alors dirigées contre le ministre, comme les prémices de la Journée des Dupes, ou la conspiration de Chalais. Le fait que le cardinal mène une guerre contre l’Espagne lui assure également l’hostilité de la reine Anne d’Autriche, d’origine espagnole.

Afin de s’assurer de garder les faveurs du roi, Richelieu cherche à affaiblir l’influence de Madame de Hautefort, amie de la reine, sur Louis XIII. Il favorise donc l’introduction auprès du roi de Henri Coiffier de Ruzé d’Effiat, fils d’un ami proche du cardinal, en 1639. Le jeune homme (“le jeusne“) devient rapidement le favori en titre : il est nommé Grand maître de la garde-robe, Premier écuyer puis Grand écuyer de France. Mais cette fortune soudaine augmente son arrogance, et les devoirs de sa charge auprès du roi lui pèsent rapidement.

Lorsqu’il souhaite obtenir un duché-pairie, afin de s’assurer l’alliance avec Louise-Marie de Gonzague, princesse de Mantoue, bien au-dessus de son rang, Richelieu et le roi s’opposent à son désir. Cinq-Mars en conçoit une forte rancune envers le cardinal.

La conspiration se déroule en pleine guerre de Trente Ans, guerre durant laquelle les alliances françaises sont favorables à la Suède et aux princes allemands.

Cinq-Mars s’entend avec François-Auguste de Thou, conseiller au Parlement et ami du marquis [?], et tout aussi ennemi du cardinal, après avoir entretenu une correspondance avec la duchesse de Chevreuse. Le marquis de Fontrailles, et surtout Gaston de France, frère du roi et de toutes les conspirations contre Richelieu, sont approchés ; Anne d’Autriche, la reine, et la duchesse de Chevreuse y sont peut-être également mêlées. Le prince de Sedan, qui avait participé l’année précédente à la bataille de la Marfée, et qui avait signé un traité échangeant sa soumission contre le commandement de l’armée d’Italie, est également des conjurés.

Le marquis prend également des contacts auprès de l’Espagne, qui doit lui assurer une force armée conséquente pour aider la conjuration. La rédaction d’un traité avec Philippe IV d’Espagne, en guerre avec la France depuis 1635, prévoit la restitution de toutes les places-fortes conquises par la France aux dépens de son pays, en échange d’une somme de 400 000 écus. De plus Gaston s’engage à signer la paix avec l’Espagne à la place du roi, et abandonnera l’alliance avec la Suède et les princes allemands. Les Espagnols massent une armée de 12 000 fantassins, et 5 000 cavaliers, dans la région de Sedan pour intervenir aux côtés des conjurés, le prince de Sedan devant leur faciliter l’entrée en France. Fontrailles signe le traité pour Gaston, et d’Olivares pour l’Espagne.

Le 17 février 1642, la Cour s’arrête à Lyon ; les conjurés ont prévu de s’emparer de Richelieu, voire en dernier recours de le tuer (“Hors de sa charge se verra desarmé“). Mais celui-ci se présente devant Cinq-Mars accompagné de son capitaine de gardes ; le marquis est intimidé et renvoie les conspirateurs.

Une correspondance secrète du marquis, qui comprend une copie du traité avec l’Espagne, est interceptée par la police de Richelieu ; elle lui est remise alors qu’il se trouve à Arles, le 11 juin (“Arles“). Dès lors la conspiration s’effondre  : de Thou et Cinq-Mars sont arrêtés à Narbonne le 13 juin (“ne monstres double soit apperceu“).

Trahis dans leur confiance, Louis XIII et Richelieu font juger Cinq-Mars et de Thou à Lyon. Ils sont condamnés à mort pour crime de lèse-majesté, et décapités le 12 septembre 1642 sur la place des Terreaux. La mère d’Henri de Cinq-Mars, la maréchale d’Effiat, est exilée en Touraine. Son frère est privé de ses bénéfices d’abbé, et le château de famille rasé « à hauteur d’infamie ».

Gaston de France est laissé hors de cause, mais le Parlement de Paris enregistre une déclaration le privant de ses droits à la régence.

Le prince de Sedan, arrêté alors qu’il commandait en Italie, est proche de laisser lui-aussi sa tête dans l’histoire, compte tenu de sa récidive après la bataille de la Marfée. Mais l’aide de sa femme, Éléonore de Bergh pousse le roi à temporiser : le prince doit échanger par traité, signé le 15 septembre 1642, les principautés de Sedan et Raucourt.

Le 4 décembre 1642, Richelieu décède (“Et liqueduct & le Prince embausmé“), mais Louis XIII continue à suivre sa politique en nommant au conseil d’État le cardinal Mazarin, un des protégés du précédent ministre.

Cinq-Mars et de Thou au pied de l’échafaud (XIXe siècle).

Voir quatrain VI-60 (siège de la Rochelle).