IX-55 : la Première Guerre mondiale (1917) et la grippe espagnole (1918).

L’horrible guerre qu’en Occident s’appreste,

L’an ensuivant viendra la pestilence,

Si fort horrible que jeune, vieux, ne beste,

Sang, feu, Mercure, Mars, Jupiter en France.

Une « horrible guerre en Occident s’apreste », un conflit d’une ampleur jamais vu dans le monde. Elle bouleversera son époque. Elle touchera principalement l’Occident, elle sera horrible avec ses dix-huit millions de morts.

« Mercure, Mars, Jupiter » seront en conjonction, le 13 juin 1917, alors que les premiers soldats américains débarquent en France.

L’année suivante, il y aura une épidémie (« L’an ensuivant viendra la pestilence »). Elle sera terrible (« Si fort horrible ») et frappera les jeunes (« que jeune ») et les vieux (« vieux »). Elle est née chez l’animal (« ne beste »). La grippe espagnole débuta en 1918 (donc l’année suivante de l’entrée en guerre des Etats-Unis) et fit cinquante millions de morts. C’est la pandémie la plus meurtrière de l’histoire en comparaison des trente-quatre millions de la peste noire. Elle fit plus de victimes que la guerre elle-même. Elle prit naissance chez le canard et le porc (« ne beste ») puis fut transmise à l’homme (« jeune, vieux »).

C’est à ce moment-là que la bête de l’Apocalypse prendra naissance.

Pour la configuration astrologique (conjonction Mercure, Mars et Jupiter) qui eut lieu le 17 juin 1917, voir mon article sur ce quatrain.

Article Wikipédia Première Guerre mondiale.

La Première Guerre mondiale est un conflit militaire (“guerre“) impliquant dans un premier temps les puissances européennes (“qu’en Occident“) et s’étendant ensuite à plusieurs continents de 1914 à 1918 (bien qu’ayant diplomatiquement perduré jusqu’en 1923 pour les pays concernés par le traité de Lausanne, le dernier à avoir été signé, le 24 juillet 1923).

Considérée comme un des événements marquants du XXe siècle (“L’horrible guerre“), cette guerre parfois qualifiée de totale a atteint une échelle et une intensité inconnues jusqu’alors. Elle a impliqué plus de soldats, provoqué plus de morts et causé plus de destructions matérielles que toute autre guerre antérieure (“Sang, feu“). Plus de soixante millions de soldats y ont pris part. Pendant cette guerre, environ neuf millions de personnes sont mortes, et environ vingt millions ont été blessées (“Sang“). D’autres événements survenus pendant cette période : le génocide arménien (1915-1916), la Révolution russe (1917) et la grippe de 1918 (“L’an ensuivant viendra la pestilence“) ont augmenté la détresse des populations. Pour toutes ces raisons, cette époque a marqué profondément ceux qui l’ont vécue. Cette guerre entraîna de nombreux changements géopolitiques qui ont profondément modifié le cours du XXe siècle. Elle a causé l’effondrement ou la fragmentation des empires austro-hongrois, russe et ottoman. L’Empire allemand a disparu, et l’Allemagne a vu son territoire réduit. En conséquence, les frontières européennes et du Proche-Orient ont été redessinées. Des monarchies ont été remplacées par des États communistes ou par des républiques démocratiques. Pour la première fois, une institution internationale a été créée dans le but de prévenir les guerres : la Société des Nations.

L’étincelle qui provoqua la guerre survint le , lorsqu’un jeune nationaliste serbe de Bosnie, Gavrilo Princip, parvint à assassiner l’archiduc François-Ferdinand, héritier du trône austro-hongrois, et son épouse. Les exigences de vengeance de l’Autriche-Hongrie (fortement encouragée par l’Allemagne) à l’encontre du Royaume de Serbie menèrent à l’activation d’une série d’alliances qui obligèrent plusieurs puissances européennes à s’engager sur la voie de la guerre. Plusieurs de ces nations étaient à la tête d’empires s’étendant sur plusieurs continents, ce qui explique la portée mondiale du conflit.

Cette guerre fut surtout le fait de deux grandes alliances : la Triple-Entente et la Triple Alliance ou la Triplice. La Triple-Entente était composée de la France, du Royaume-Uni, de la Russie, et des empires qu’elles contrôlaient en tant que grandes puissances coloniales. Plusieurs États se joignirent à cette coalition, dont la Belgique, envahie par l’Allemagne, qui fit appel à la France et au Royaume-Uni garantes de son indépendance. Le Japon rejoignit la coalition en août 1914, l’Italie en avril 1915, la Roumanie en août 1916 et les États-Unis en avril 1917, ainsi que de nombreux autres pays moins puissants. La coalition de la Triple Alliance était initialement constituée de l’Allemagne, de l’Autriche-Hongrie, et des empires qu’elles contrôlaient. L’Empire ottoman les rejoignit en octobre 1914, suivi un an plus tard du Royaume de Bulgarie. À la fin des hostilités, seuls les Pays-Bas, la Suisse, l’Espagne, le Danemark, la Norvège, la Suède, le Liechtenstein et Monaco étaient demeurés officiellement neutres parmi les nations européennes, mais certains États neutres avaient participé financièrement ou matériellement aux efforts de guerre des protagonistes.

Les combats se déroulèrent sur différents fronts situés surtout en Europe, mais une petite partie de l’Asie, de l’Océanie et de l’Afrique, ainsi que l’Atlantique Nord subirent des actions militaires. Le front de l’Ouest était caractérisé par un ensemble de tranchées et de fortifications séparées par une aire surnommée le no man’s land. Ces fortifications s’étendaient sur plus de 600 kilomètres, incitant à une forme de combats dénommée « guerre des tranchées ». Sur le front de l’Est, l’étendue des plaines et la faible densité ferroviaire ont empêché une stabilisation des champs de bataille, mais le conflit était tout aussi étendu. Il y eut d’importants combats dans les Balkans, au Moyen-Orient et en Italie. Cette guerre a été la première où les aéronefs (ballons fixes ou dirigeables et, de plus en plus, avions) ont joué un rôle tactique important, d’abord pour l’observation et la reconnaissance, puis pour la chasse et le bombardement. Elle donna également lieu au premier engagement massif de sous-marins de combat, et à une véritable guerre de course menée contre des flottes commerciales, qui atteignit un paroxysme lors de la première bataille de l’Atlantique.

Article Wikipédia Etats-Unis dans la Première Guerre mondiale.

Les États-Unis pendant la Première Guerre mondiale sont impliqués dans ce conflit avant leur entrée en guerre. Lors du vote de la déclaration de guerre officielle, le 6 avril 1917, par le Congrès des États-Unis aux côtés – mais non au sein – de la Triple-Entente , ceux-ci sont déjà engagés aux côtés des démocraties et de nombreux citoyens américains combattent comme volontaires dans les forces alliées.

Alors que le traité de Brest-Litovsk sur le Front de l’Est permit aux Empires centraux de concentrer leurs forces sur un seul front et de disposer d’une supériorité numérique temporaire grâce à laquelle ils purent lancer des offensives importantes en France au printemps 1918, l’arrivée de l’American Expeditionary Force sur le terrain fut l’une des clés de la victoire de la Triple-Entente. Lors de l’armistice, le 11 novembre 1918, environ 2 millions de soldats américains étaient en France répartis dans 42 divisions, dont 1 million déjà engagés dans les combats. Deux autres millions étaient aux États-Unis dans les camps d’entraînement. Les plans prévus par Foch, Pétain et Pershing pour 1919 prévoyaient l’engagement de 4,5 millions de soldats américains dans les offensives de la victoire qui les mèneraient au cœur de l’Allemagne.

Le 13 juin 1917 (“Mercure, Mars, Jupiter“), 177 Américains, dont le général John Pershing, commandant en chef du corps expéditionnaire désigné après la mort subite du général Frederick Funston en début d’année, et le capitaine George Patton, débarquent à Boulogne-sur-Mer (“en France“)dans la liesse populaire. « Avec leurs uniformes de drap olive, leurs feutres à larges bords, leurs ceintures à pochettes multiples, cette allure de jeunes cow-boys de l’Ouest américain, ils apportaient une note de pittoresque inédit dans nos décors de guerre » relate le journal L’Illustration.

Le général Pershing, placé à la tête de l’American Expeditionary Force (AEF), a reçu les consignes suivantes du président Wilson :

1. Mise sur pied d’une armée américaine indépendante.

2. L’instruction, commencée en Amérique, se terminera en France. Quatre divisions d’infanterie sont mises immédiatement à l’instruction. L’instruction des unités américaines dans la zone des armées sera assurée par des unités combattantes françaises.

Les Français et les Anglais pensaient intégrer les soldats Américains dans leurs unités et sous leur commandement. C’est la question de « l’amalgame » qui va préoccuper les relations entre alliés jusqu’à la fin de la guerre. Une des premières missions confiées à Pershing par Wilson est de mettre sur pied une armée américaine indépendante.

Article Wikipédia grippe de 1918.

La grippe de 1918, surnommée « grippe espagnole » (“viendra la pestilence“), est due à une souche (H1N1) particulièrement virulente et contagieuse de grippe qui s’est répandue en pandémie de 1918 (“L’an ensuivant“) à 1919. Cette pandémie a fait 50 millions de morts selon l’Institut Pasteur, et jusqu’à 100 millions selon certaines réévaluations récentes (“Si fort horrible“). Elle serait la pandémie la plus mortelle de l’histoire dans un laps de temps aussi court, devant les 34 millions de morts (estimation) de la peste noire.

Apparemment originaire de Chine, ce virus serait passé, selon des hypothèses désormais controversées, du canard au porc (“ne beste“) puis à l’humain, ou selon une hypothèse également controversée directement de l’oiseau à l’humain. Il a gagné rapidement les États-Unis, où le virus aurait muté pour devenir plus mortel. Cette nouvelle souche est trente fois plus mortelle que les grippes communes avec 3 % des malades. Elle devint une pandémie, lorsqu’elle passa des États-Unis à l’Europe, puis dans le monde entier par les échanges entre les métropoles européennes et leurs colonies.

Elle fit environ 408 000 morts en France, mais la censure de guerre en limita l’écho, les journaux annonçant une nouvelle épidémie en Espagne, pays neutre et donc moins censuré, alors que l’épidémie faisait déjà ses ravages en France. Elle se déroula essentiellement durant l’hiver 1918-1919, avec 1 milliard de malades dans le monde, et 20 à 40 millions de morts, selon de premières estimations très imprécises faute de statistiques établies à l’époque. Au début du XXIe siècle, le maximum de la fourchette reste imprécis mais a été porté à 50100 millions, après intégration des évaluations rétrospectives concernant les pays asiatiques, africains et sud-américains.

En quelques mois, la pandémie fit plus de victimes que la Première Guerre mondiale qui se terminait cette même année 1918 ; certains pays seront encore touchés en 1919.

La progression du virus fut foudroyante : des foyers d’infection furent localisés dans plusieurs pays et continents à la fois en moins de trois mois, et de part et d’autre des États-Unis en sept jours à peine. Localement, deux voire trois vagues se sont succédé, qui semblent liées au développement des transports par bateau et rail notamment, et plus particulièrement au transport de troupes.

Cette pandémie a fait prendre conscience de la nature internationale de la menace des épidémies et maladies, et des impératifs de l’hygiène et d’un réseau de surveillance pour y faire face. Il y a ainsi dans l’une des clauses de la charte de la SDN, la volonté de créer un Comité d’hygiène international, qui deviendra l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Les décès furent essentiellement de jeunes adultes (“Si fort horrible que jeune, vieux“), ce qui peut surprendre : les jeunes adultes sont habituellement la génération la plus résistante aux grippes. Ceci a d’abord été expliqué par le fait que cette tranche d’âge (notamment pour des raisons professionnelles ou de guerre) se déplace le plus ou vit dans des endroits où elle côtoie de nombreuses personnes (ateliers, casernes…). La multiplicité des contacts accroît le risque d’être contaminé. Cette constatation a été faite par les historiens (notamment lors de l’épidémie de choléra à Liège en 1866).